Valérie Kasteler-Budde: « J’entendais les questions de la gauche »

Cuisinée à toutes les sauces sur les médias publics, la co-présidente du Parti évangélique genevois et du comité d’initiative « financer l’avortement est une affaire privée », revient sur le traitement médiatique réservé à un positionnement pourtant fort simple, celui de la lutte pour la vie. Interview.

 

Depuis plusieurs semaines, Valérie Kasteler-Budde fait le tour des studios de radio et télévision et agit comme une sorte de révélateur de la crispation médiatique sur la question de l'avortement. Analyse.

L'on se souvient des réflexions inquiètes du JT de la RTS quant à l'emploi d'images de "maternité heureuse", de la fébrilité d'Esther Mamarbachi ou des basses méthodes d'un Simon Matthey-Doret égrainant lieux communs et autres poncifs inquisitoriaux, l'avortement est le sujet qui les blesse, qui les dérange et qui les choque; le dernier tabou. Un tabou fondé non sur le sujet à proprement parler mais sur l'obstination rebelle des anti-avortement à ne pas vouloir se soumettre à tout jamais à la victoire d'un instant survenu il y a près de douze ans. Crue sur le terreau des contestations révolutionnaires, la gauche ne tolère pas de pouvoir en être victime un jour. Chronique d'un monde qui change.

"Depuis le début, c'est comme si nos opposants cherchaient à nous ramener dans le débat de 2002 [...]  C'était la grande crainte, qu'on rouvre cette page de l'histoire et qu'on reparte sur ce débat-là, et on a toujours cherché à nous faire endosser notre "incohérence" à vouloir reparler de ce sujet, qui avait été plébiscité en 2002 par plus de 72% des votants en Suisse, en nous disant: Vous n'avez aucune crédibilité [...] donc taisez-vous !"

Au contraire du discours officiel, ce silence sur le fond tend à une déresponsabilisation, une déshumanisation du rapport à l'autre, cette réduction du corps du foetus à celui de la femme, dans l'horizon féministe, est à l'origine d'excès comme ceux que nous constatons aujourd'hui avec la gestation pour autrui et l'industrie de la location des ventres. Une société qui se décompose peu à peu.

Quant à son expérience dans les médias publics, Valérie Kasteler-Budde est sans illusion:

"J'entendais les questions de la gauche, j'entendais, en fait, tout le discours du PS qui m'était renvoyé, comme si les journalistes ne savait pas différencier leurs capacités de médiation, leur neutralité journalistique, du discours du PS en face. Esther Mamarbachi reprenait à son compte tout l'argumentaire qui avait été présenté par le Conseil fédéral. Je l'ai trouvée assez partisane, je le lui ai dit.

J'ai été un peu déstabilisée au départ d'avoir été interrompue plusieurs fois à chaque fois que j'essayais de développer mes arguments. Après, je me suis dit, c'est son jeu, allons-y... On sent très bien le positionnement des journalistes, on sent ce qu'ils pensent [...] Mais l'auditeur n'est pas dupe."

 Valérie Kasteler-Budde dit encore la déception qui fut la sienne devant la position des Eglises chrétiennes:

"J'ai été extrêmement déçue par cette position en tant que chrétienne, ça m'a beaucoup attristée. Et puis, j'ai cherché à comprendre pourquoi ce positionnement des Eglises était tellement frileux, tellement peureux, alors qu'on a besoin de l'Eglise pour nous sortir du marasme dans lequel on est à l'heure actuelle au niveau de la société. On a besoin de réponses claires, on a besoin de valeurs qui parlent de vie, qui parlent de confiance, qui parlent de foi, qui parlent d'espérance. On a besoin de ces réponses-là à l'heure actuelle, dans une société qui ne sait plus qui est qui, qui a des problèmes sur le genre humain, sur l'identité, on est dans une période de marasme total, et si l'Eglise ne donne pas des réponse claires, je ne sais pas qui les donnera."

Mais ce silence des institutions doit engendrer une réaction des individus:

"C'est peu-être les personnes chrétiennes qui doivent se lever, c'est peut-être l'individu qui doit faire entendre raison à l'institution.

[...] Je compte sur les personnes pour se lever et faire entendre un son clair."

 

Interview de Valérie Kasteler-Budde, lesObservateurs.ch 20.01.2014

 

Bonus:

Pour juger du traitement de la question à la RTS, voir les trois premières minutes de l'émission Faut pas croire... La présentatrice à Valérie Kasteler-Budde: "Vous mettez en péril la démocratie." Toujours en présence d'un "éthicien", nouveau clergé de la société de consommation, pour qui l'être humain, dans le ventre de sa mère, n'est pas une personne humaine (plus ici et ici sur ce sujet).  "C'est un peu Ponce Pilate, excusez-moi", renchérit la speakerine, c'est bien sûr les pro-vie qui se lavent les mains du sang innocent...

 

Voir encore

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3 commentaires

  1. Posté par Iphigenio le

    C’est effectivement très courageux de la part de Madame Valérie Kasteler-Budde de s’exprimer à ce sujet. Et merci au journaliste, qui contrairement à ses collègues de la RTS, lui laisse le temps de finir ses phrases et lui pose les bonnes questions. La réflexion de Madame Kasteler-Budde va bien plus loin que ce que laisse entendre les politicards et répond aux questions essentielles que soulève cette initiative. Le « 120 minutes » mettant en scène un pro-vie coincé, ridiculisé pour ses opinions m’attriste, et je remercie Madame Kasteler-Budde de donner une image un peu plus glamour des défenseurs de la Vie !

  2. Posté par Marie-France Oberson le

    « Valérie Kasteler-Budde dit encore la déception qui fut la sienne devant la position des Eglises chrétiennes:
    « J’ai été extrêmement déçue par cette position en tant que chrétienne, ça m’a beaucoup attristée. Et puis, j’ai cherché à comprendre pourquoi ce positionnement des Eglises était tellement frileux, tellement peureux,
    Apparemment elle n’a pas trouvé la réponse…
    Personnellement je pense que certains responsables des Eglises chrétiennes veulent montrer que leur Eglise est »ouverte », » moderne », à l’écoute des problèmes de notre temps etc… pensant ainsi attirer des fidèles et re-remplir leur église .
    Ainsi dans dans la presse ce matin , la position de Mgr Morero…qui ne prend pas le risque de se mouiller en donnant une réponse de Normand au contraire de l’Evêque de Coire qui soutient l’initiative.
    Je signale que le pape François a dit son « horreur » de l’avortement. Il va moins plaire !
    http://www.liberation.fr/societe/2014/01/19/le-pape-francois-soutient-la-manif-anti-ivg-a-paris_973916

    Et que dire de certains médecins? Le serment d’Hippocrate est-il toujours d’actualité ? Les nouveaux médecins le signent-ils toujours ?
    Le remboursement de l’IVG,au travers de mes cotisations à mon Assurance maladie me rend donc solidaire , contre ma volonté ,d’une pratique à laquelle je suis opposée…

  3. Posté par Reifsteck Christophe le

    Tout d’abord merci à Madame Valérie Kasteler-Budde pour son grand courage et son engagement. S’attaquer à un tel sujet demande du cran, de la force, de la foi et surtout de l’amour. Oui il faut du cran pour ne pas baisser les bras face à cette montagne destructrice, de la force pour dire non à ces médias faisant la promotion de l’avortement, ces courants féministes agressifs, ces partis politiques qui considèrent l’enfant dans le sein de sa mère comme un amas de cellules insignifiantes mais prêts à faire de ce même ventre une occasion mercantile (GPA). Il faut de la foi en effet pour ne pas désespérer fasse à un tel déni, celui de vivre en toute sécurité et d’être aimé par sa mère et son père. Comment une société est-elle arrivée à remettre ce droit le plus fondamental en cause? Il faut la force de l’amour pour se lever malgré toute l’adversité et dire non! Voilà pour l’encouragement à madame Valérie Kasteler-Budde et tous ceux qui se lèvent dans ce devoir de lutte.
    J’ai été très attristé et choqué de la prise de position de l’Eglise Protestante (si on peut encore l’appelée ainsi puisqu’elle ne proteste plus malgré l’extrême gravité). J’aimerais s’il vous plait plus de détail à ce sujet: S’agit-il de l’Eglise Protestante Genevoise ? Quand et comment a-t-elle pris cette position si coupable (il s’agit là de ma propre opinion)? Madame Kasteler-Budde affirme avoir entendu dire que dans certaines classes d’écoles concernant des 12 -14 ans il leur a été demandé de se déshabiller afin de se s’observer les uns les autres. Je trouve cela extrêmement grave et mérite à mon sens de plus amples explications. Pouvez-vous me préciser où cela c’est passé, des documents attestant ces faits?
    Avec mes cordiales salutations et merci pour votre site internet. Je prends bien plus de plaisir à vous lire que les nombreux journaux à grands tirages. Bravo
    Christophe Reifsteck

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