Mgr Huonder: « Le fidèle veut une déclaration claire »

Suite à la déclaration controversée de la Conférence des évêques suisse sur le soutien à apporter à l’initiative « Financer l’avortement est une affaire privée », Mgr Vitus Huonder, évêque de Coire justifie la position de ses confrères sans pour autant la défendre inconditionnellement. Interview exclusive.

Les Observateurs: Le 6 décembre dernier, la Conférence des Évêques suisses (CES) a publié un communiqué intitulé « Priorité à la protection de la vie » dans lequel elle soulignait que, si l'initiative populaire « Financer l'avortement est une affaire privée » était « positive », elle était néanmoins insuffisante.

La presse nationale a retenu de ce communiqué que les évêques suisses renonçaient à une décision claire pour laisser la liberté de vote sur cette question. Selon vous cette interprétation est-elle correcte, la presse a-t-elle bien compris ?

Mgr Huonder: C'est vrai, on pourrait le déduire du texte. C'est pourquoi j'ajoute qu'il est important que chaque fidèle décide d'après une conscience bien formée. C'est l’enseignement clair de l'Eglise qui fournit les arguments, comme, par exemple, dans le Catéchisme de l'Eglise Catholique. J'ai toujours souligné qu'en matière d'avortement, il s'agissait d'un cas de conscience. C’est à ce problème que l'initiative veut répondre, et c’est un problème qu’il faut absolument prendre au sérieux.

La CES voulait dire que l'aspect financier, mis en relief par l’initiative, ne suffisait pas, mais qu'il fallait prendre en considération le problème dans toute sa dimension. L'initiative est un pas dans la bonne direction. D'autres mesures sont nécessaires, il faut surtout augmenter l'aide pour les mères en difficulté.

Giuseppe Gracia, porte-parole de l’évêché de Coire, aurait déclaré que : « La conférence épiscopale a clairement exprimé de la sympathie pour l’initiative populaire. Celle-ci est un pas dans la bonne direction ». Pensez-vous que le refus d'une consigne de vote claire, puisse être réellement, dans ce contexte, interprété comme un soutien à l'initiative ?

En tenant compte de tout le contexte de la déclaration, le fidèle peut comprendre dans quelle direction il faut aller parce que le texte parle du but prioritaire de la protection de la vie. Il dit aussi que l’avortement est un péché grave. Pourtant, je regrette le manque d’une prise de position univoque en faveur de l'initiative.

La déclaration de la CES a suscité le trouble et une profonde amertume au sein de l'assemblée des fidèles, le comité d'initiative a fait part de son « scepticisme » et diverses associations d'inspiration catholique ont manifesté leur incompréhension. Comprenez-vous ces réactions ?

Le fidèle veut une déclaration claire et une parole nette. C'est ce que je constate. Et je pense, qu'il y a droit. C'est pourquoi - je l'ai déjà dit - le fidèle doit se rassurer sur la doctrine de l'Eglise universelle.

La déclaration de la CES semble reprocher à l'initiative de ne pas participer suffisamment d’ « un renversement d’opinion sur la question de l’avortement ». Pensez-vous qu’une initiative dont le but serait d’annuler la dépénalisation de l’avortement aurait des chances d’aboutir aujourd’hui ?

Il faut dire que le comité d'initiative, dans les circonstances dans lesquelles nous nous trouvons, a fait de son mieux.

L'association Choisir la vie a répondu à la CES dans une lettre ouverte arguant d'une encyclique du pape Jean-Paul II selon laquelle il relèverait d'une « obligation grave » pour le catholique « d'apporter son vote à une proposition destinée à limiter les préjudices d'une loi [permettant l'avortement] et à en diminuer ainsi les effets négatifs sur le plan de la culture et de la moralité publique ». Selon vous, comment juger de la position de la CES devant une semblable interprétation ?

Il faut absolument suivre le raisonnement de l'encyclique, qui ne fait que reprendre et confirmer l’enseignement catholique constant. C'est l'aune à laquelle il convient de mesurer - pour l'interpréter, voire l'augmenter et la compléter - la déclaration de la CES.

Devant la critique de l'initiative par la CES, certaines voix reprochent la situation actuelle au manque d'engagement des évêques suisses en 2002, lors de la votation sur la solution des délais. Que leur répondez-vous ?

Je ne peux que confirmer cette constatation.

Ces dernières années, les institutions catholiques semblent avoir connu quelques déboires concernant le financement de structures favorables à l'avortement, vous-même avez menacé d'attaquer le Parlement de l'Eglise grisonne. L'Eglise catholique a-t-elle perdu tout contrôle sur ses propres institutions ?

L'expérience que j’ai faite récemment dans mon diocèse montre qu'il faut être très vigilant et très attentif, vu la grande confusion d'esprit et la désorientation morale qui, de nos jours, entrent dans toutes nos institutions.

Cotisez-vous à l'assurance-maladie ?

Vous connaissez les lois suisses !

Allez-vous voter en faveur de l'initiative ?

Cela va de soi.

2 commentaires

  1. Posté par Sylvie R G le

    Il y a aussi d’autres choix que d’avorter : l’adoption, familles d’accueil et pensionnant (c’est mon mari) ou simplement la solidarité familiale (c’est mon cousin) et je peux vous dire que dans ma famille il n’y a aucun regret ! ATTENTION ! « Malheur à toi qui déclare bien ce qui est mal » dit la Bible.
    Cette initiative est bien parce que ceux qui sont d’accord avec l’avortement prendront une assurance privée et les autres ne remboursent pas les avortements des autres ! Mais il faut prévoir (comme le moyen contraceptif aussi !) On fait comme en Autriche, Texas et autres états…BRAVO POUR CETTE INITIATIVE

  2. Posté par Pierre-Henri Reymond le

    Habituellement un commentaire, après la saisie du code et « poster » est lisible, assorti de « votre commentaire sera publié après modération ». Ce soir ce ne fut pas le cas! Donc, a toi hasard, je répète: me projetant dans l’embryon et m’identifie à lui, je m’insurge contre la femme qui m’identifie à son corps! Justifiant ainsi la liberté d’en faire ce qu’elle veut. Non seulement je m’insurge, mais j’exige de ne pas naître d’elle! Plutôt mourir! Mais j’en connais une qui, il y a longtemps et ne voulant pas d’enfant, à voulu avorter! Mais c’était quasi impossible en Suisse, il fallait aller en Italie! Alors elle a dit, merde, je le garde! Et ne s’en est jamais repentie! Deux autres enfants ont suivi.

Et vous, qu'en pensez vous ?

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