Une gauche qui soutient l’UE renie ses valeurs.

Albert Leimgruber
Rédacteur

 

Non, je ne suis pas un homme de gauche. Mais je partage toutefois un certain nombre de valeurs avec la gauche traditionnelle, comme par exemple le rejet d’une forme de capitalisme monopolistique s’enrichissant sur le dos des travailleurs ou encore la lutte contre la privatisation de certains domaines sensibles, comme la santé ou les assurances sociales. Il s’agit de deux revendications fondatrices de la gauche, telle qu’elle s’est formée avec l’essor de l’industrialisation et la lutte des classes. Il s’agit de deux piliers principaux pour les penseurs de gauche.

 

Aujourd’hui, la gauche suisse a abandonné ces valeurs fondatrices pour en embrasser d’autres. L’ouverture inconditionnelle et l’abandon de tout ce qui peut ressembler de près ou de loin à l’Etat-nation en tant qu’institution fondatrice des relations internationales est devenu le nouveau centre de gravité de tout mouvement, parti ou association qui se dit « de gauche ». La défense des travailleurs ne fait visiblement plus partie de leurs préoccupations. Le PS, les verts et les syndicats défendent le principe de la libre circulation des personnes, pourtant le symbole absolu d’une politique néolibérale au profit des multinationales sur le dos des travailleurs. Après la délocalisation des usines, la libre circulation permet la délocalisation des travailleurs.

 

Un autre exemple est la protection de l’environnement. La sortie du nucléaire et la renaturation des cours d’eau est soutenue à bout de bras par les écologistes et leurs partenaires socialistes. En même temps, on soutient le droit à l’immigration pour un demi-milliard d’européens en Suisse sans s’affoler du bétonnage de la Suisse qui en résulte – sauf bien évidemment lorsqu’il s’agit de résidences secondaires propretés de salauds de riches suisses…

 

La gauche suisse ne dit rien par rapport au partenariat transatlantique de commerce et d’investissements (PTCI ou TTIP en anglais), un accord de libre-échange qui place les multinationales au-dessus des Etats, qui sacrifie toutes les normes en matière de protection de l’environnement en Europe, qui abandonne la protection du consommateur, qui néglige la santé publique, qui impose la loi du marché dans tous les domaines de la vie publique. Ce hold-up sur la démocratie européenne n’est nullement critiqué par une gauche aveuglée par son adoration des institutions néolibérales de Bruxelles.

 

Pour la gauche, tous les problèmes actuels doivent trouver une solution sur le plan international. L’immigration ? C’est l’UE qui doit s’en occuper. La fiscalité ? C’est un accord international qui doit régler le différend. L’insécurité et la criminalité ? C’est du ressort de Schengen. En bref : la gauche rejette la responsabilité et veut tout déléguer à des instances qui prennent les décisions en dehors de tout cadre démocratique. Le voici, le vrai visage de la gauche du XXIème siècle : le déni du citoyen en tant que décideur. Quel retournement pour cette gauche, qui jadis s’appuyait sur la volonté populaire pour faire passer ses revendications !

 

Le sacrifice de leurs valeurs traditionnelles sur l’autel de l’internationalisation a démasqué les réelles intentions de la gauche : la prise du pouvoir et la mise sous tutelle du citoyen, l’abandon de nos libertés au profit d’un système hiérarchisé ou tous les domaines de nos vies seront régis par des lois et ordonnances prises à huis clos. La gauche renie ses origines et détruit notre avenir. Reste à espérer que les citoyens se réveilleront en octobre, et que la tendance affirmée en Bâle-Campagne, à Lucerne, au Tessin et à Zurich se poursuivra !

Albert Leimgruber, 11 mai 2015

Redacteur en chef Voix Libre

www.voix-libre.net

5 commentaires

  1. Posté par patrick lévy le

    …, que cet article serve de leçon à la gauche française. Merci. Patrick Lévy.

  2. Posté par Pierre H. le

    @Albert Leimgruber
    Mon commentaire précédent ne porte que sur le texte que j’ai extrait de votre article, pas du tout sur tout l’article que j’ai trouvé très juste et pertinent. D’ailleurs, je lis La Voix Libre et vous félicite de le publier 🙂
    Ce que je voulais surtout dire, c’est que dans un vrai monde capitaliste, il ne peut pas y avoir de monopole ou alors certains peuvent avoir un monopole très éphémère. Qu’est-ce qu’un monopole, finalement et qu’est-ce qui le rend possible ? Les lois ! Et qui édicte les lois ? L’Etat ! Et par essence, l’Etat est socialiste. Un monopole, c’est un concept, c’est quand quelqu’un est protégé par des articles de lois qui autorisent ceci pour un mais l’interdisent pour l’autre. Sans cela, naturellement, il n’y a pas de monopole et le champ est libre pour tous. Vous fabriquez des marchandises ou délivrez un service, et les gens aiment ou n’aiment pas et achètent ou n’achètent pas ou achètent ailleurs ou fabriquent eux-mêmes.

  3. Posté par Pierre H. le

    « Mais je partage toutefois un certain nombre de valeurs avec la gauche traditionnelle, comme par exemple le rejet d’une forme de capitalisme monopolistique… »

    Oui, une forme de capitalisme monopolistique privé que la gauche a remplacé par un capitalisme monopolistique d’Etat qui est bien pire encore ! Si vous n’êtes pas content avec Nestlé, vous leur faites un doigt d’honneur et ça s’arrête là. Ce n’est pas le socialisme ou le capitalisme qui sont pour le peuple, c’est la démocratie. Or le socialisme, même « traditionnel », a du mal à respecter la démocratie. La démocratie, c’est que chacun a la même voix de vote, quelque soit son statut, sa fortune, sa religion, etc. Et ça n’est pas le socialisme qui nous a amené ça ! Au contraire, le socialisme a créé des fractures sociales et des dissensions entre des « classes » créées de toutes pièces. Ils ont divisé les gens. C’est cousu de fil blanc l’histoire des méchants capitalistes qui exploitaient les pauvres et voilà tel Zorro les gentils socialistes qui arrivent pour les sauver. Il faut se remettre dans le contexte des époques. Les gens crevaient de faim et grâce à l’ère de l’industrialisation, ils pouvaient manger à leur faim et aucun n’aurait voulu quitter son patron et retourner dans sa condition antérieure. Puis, les socialistes sont arrivés, ont subrepticement mené leur barque et on voit dans quel état est le monde aujourd’hui. Nous ne sommes plus en vrai démocratie, la gauche l’ayant détruite.

  4. Posté par Jean-Luc V. le

    Rien à rajouter! Parfait!

  5. Posté par Lucie le

    EXACT, excellent article, la vraie gauche est par exemple celle de la gauche grecque qui est pour le Peuple. Rappel des dérives de la gauche au cours de l’Histoire qui a viré au nazisme : http://www.fonjallaz.net

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