Big Brother Valls vous écoute… pour votre bien ?

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imagesLe pire adversaire des démocraties libérales est le terrorisme. Tant qu’il existe, en effet, ce régime a montré qu’il était capable de lutter contre ses adversaires intérieurs ou extérieurs avec efficacité dès lors que le temps avait consolidé sa légitimité. A l’abri des coups d’Etat, vainqueur des confrontations avec les régimes totalitaires, son apparente fragilité cache une résistance en profondeur. Toutefois, ses ennemis les plus sournois sont les terroristes. Leur but n’est pas de prendre le pouvoir. Ils vont, au contraire, renforcer l’unanimité contre eux et atténuer les divisions politiques. On l’a vu à la suite des attentats de Janvier. Ils ne vont pas non plus susciter un mouvement d’opinion en leur faveur. Mais, ils vont justifier des mesures destinées à les combattre, et adaptées à leurs méthodes. C’est à ce moment que, par une sourde contamination, le terrorisme risque de faire basculer la démocratie, de l’acculer au paradoxe de lui faire quitter ses valeurs pour les défendre.

Le principe fondamental des démocraties libérales est la liberté. Celle-ci suppose un champ d’application défini par la loi qui en énumère les domaines et circonscrit l’espace où elle est inviolable. Montesquieu disait que « la liberté chez un citoyen vient du sentiment qu’il a de sa sûreté ». Je dois pouvoir penser, m’exprimer, agir, me déplacer, etc… sans en être empêché par un autre, fût-ce le détenteur d’un pouvoir. Au contraire celui-ci doit protéger ma liberté dans la mesure où elle est licite. Or la menace terroriste porte atteinte de la manière la plus violente à ce principe. Lorsqu’un Juif pratiquant librement sa religion, ayant choisi pour ses enfants une école confessionnelle, pense qu’il doit quitter la France après l’attentat qui a frappé l’établissement scolaire qui les accueille, on voit à quel point le seul risque terroriste sape les libertés fondamentales. Mais, c’est une arme à double tranchant, car les Etats pour assurer la sécurité et donc la liberté des personnes seront tentés de limiter la liberté. Le débat existe dans toutes les démocraties. Il a lieu en ce moment même chez nos voisins suisses. En France, pour la quatrième fois depuis 1991, il se déroule à l’Assemblée à l’occasion de la présentation de la Loi sur le Renseignement.

Le but de la loi est double : faire face au terrorisme en accroissant les performances du renseignement, la détection des personnes et la prévention des actes, mais aussi légaliser les moyens existants qui doivent sans cesse s’adapter aux évolutions des technologies et des pratiques qu’elles entraînent. Repérer en amont un djihadiste par ses appels téléphoniques ou ses connexions sur la toile paraît logique et légitime. 63% des Français seraient favorables à une limitation de leurs libertés pour lutter contre le terrorisme. Mais, comme toujours, le diable se niche dans les détails,  a priori dans les modalités plus que dans les objectifs. Toutefois, il y pointe déjà le bout de sa corne. Le terrorisme n’est que l’un des sept buts énumérés. Les autres ouvrent très largement l’éventail : de l’indépendance nationale à la délinquance organisée en passant par les intérêts « majeurs » du pays en politique étrangère ou économique. Sans insister sur l’interprétation du qualificatif « majeur », on soulignera également l’intérêt porté aux atteintes à la forme républicaine des institutions et à la reconstitution des groupements dissous. Il y a là clairement la possibilité d’une surveillance politique d’autant plus à craindre de la part d’un gouvernement qui ne cesse de contester l’appartenance à la République de certains de ses opposants.

Or, l’urgence, la nécessité d’apporter des réponses rapides justifient le recours à la procédure administrative en contournant la décision judiciaire. Les décisions de mise sur écoute seront prises par le Premier Ministre, avec ou sans avis consultatif, selon l’urgence, d’une nouvelle « Autorité  Administrative Indépendante », la Commission Nationale de Contrôle Technique du Renseignement. Autrement dit, l’exécutif est le seul maître. Les recours seront possibles auprès de la Commission puis du Conseil d’Etat, une fois bien sûr qu’il sera trop tard pour échapper à une intrusion dans sa vie privée. De plus, cette observation rapprochée se fera à partir d’une surveillance massive de tous les Français. Certes, celle-ci sera automatiquement effectuée par des machines qui repéreront au moyen de logarithmes et de schémas les échanges et les individus potentiellement dangereux, mais l’utilisation d’ IMSI-catchers, fausses antennes-relais saisissant toutes les données téléphoniques dans un rayon de 500 mètres ou de « boîtes noires » chez les opérateurs ou les hébergeurs enregistrant les métadonnées des internautes, est à l’évidence une menace pour les libertés individuelles. Localiser un individu, connaître ses contacts, ses centres d’intérêt est parfois plus instructif que d’écouter une conversation. A ce stade, l’anonymat est préservé, mais dans un processus qui permet justement à terme d’identifier les individus… On comprend donc que de la CNIL à Reporter sans Frontières, en passant par le juge Trévidic et par la Quadrature du Net, ce projet soulève de nombreuses objections.

Eradiquer le terrorisme et le djihadisme est un impératif. Il s’agit là de guerre plus que de police. C’est la raison pour laquelle il aurait été plus légitime au gouvernement de mieux cibler son action, et de réserver les décisions à des commissions permanentes, capable d’agir vite, en se relayant, comprenant un représentant de l’exécutif, un magistrat et un parlementaire, afin d’être à l’abri du risque de l’arbitraire. Ce débat aura, au moins, permis de distinguer ceux qui voulant défendre la sécurité égratignent la liberté, le Premier Ministre, par exemple, et ceux qui sont farouchement opposés à la sécurité et donc à la liberté, qui dans le fond sont des ennemis du Bien Commun. La Ministre de la Justice, soutenue par Mme Duflot ou M. Mamère, avait déposé un amendement excluant le renseignement pénitentiaire de la communauté du renseignement, c’est-à-dire des acteurs de la loi. Mettre les détenus à l’abri de la surveillance que subiront tous les Français : quel aveu ! Sur cette question, un vrai démocrate libéral, un patriote attaché au Bien Commun doit rechercher l’équilibre.

 

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