Le féminisme a désincarné les femmes

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"C'est la thèse, mordante, défendue par Camille Froidevaux-Metterie dans son essai, La Révolution du féminin. Née en 1968, cette professeure de science politique à l'université de Reims Champagne-Ardenne, ancienne élève de l'historien Marcel Gauchet, veut mettre un grand coup de pied dans la fourmilière des études féministes.

Son approche personnelle, tout à la fois historique et philosophique, se démarque nettement des gender studies, qui postulent que le genre est une construction sociale, et qui ont été au centre des polémiques lancées par la Manif pour tous et des débats brûlants sur les ABCD de l'égalité. La chercheuse préfère observer comment, en quel­ques décennies, la condition féminine s'est radicalement transformée.

Quel nouveau visage affiche cette femme contemporaine ? Revenant à la bipolarité entre le féminin et le masculin, et à l'importance de la maternité, sa position paraîtra sans doute rétrograde à certains."

Elle déclare à Télérama :

Depuis les années 70, la pensée féministe s'est attachée à extraire les femmes de la sphère domestique, où elles avaient été enfermées pendant des siècles. Libre de ses choix et de sa sexualité, la femme n'est désormais plus réduite à sa seule nature procréatrice. Le problème, c'est qu'en se voyant affranchie de son destin maternel, la femme a aussi vu sa condition incarnée dévalorisée, comme si le processus de l'émancipation devait passer par un processus de désincarnation, comme si c'était le corps des femmes qui posait problème

Dans le sillage de Simone de Beauvoir, il s'est trouvé stigmatisé, synonyme de destin subi, lieu par excellence de la domination masculine. Mais en réduisant ainsi le corps féminin au statut d'instrument favori de la domination, on a finalement contraint les femmes à dénier leur propre corporéité. Pourquoi, après avoir été longtemps considérées comme de simples corps, les femmes devraient-elles vivre aujourd'hui comme si elles n'en avaient pas ? Le corps est aussi pour elles un espace de liberté. Je cherche donc à réhabiliter cette dimension incarnée et sexuée de l'existence féminine.

[...] Quand j'ai été recrutée à l'université Paris-II, j'étais enceinte de sept mois ; quand j'ai commencé à enseigner, mon fils n'avait que quelques semaines. A l'université, tout se passait comme si je n'avais pas de nourrisson qui me réveillait trois fois par nuit… Et à la maison, tout se passait comme si je n'avais pas de cours à préparer… J'ai vécu une immense déflagration lorsque j'ai pris conscience qu'être femme aujourd'hui, c'était cela : travailler, faire des enfants, et surtout ne pas en parler. Faire comme si c'était évident, alors que c'est la chose la plus compliquée du monde.

Cette dualité caractérise à mes yeux la femme contemporaine : engagée dans l'espace du travail et de la citoyenneté, elle n'en demeure pas moins toujours requise dans l'espace intime des relations affectives et familiales. [...]

Il n'y a pas une bonne façon d'être femme aujourd'hui, et je déteste quand le féminisme devient normatif, après avoir tant lutté contre les normes. C'est le cas parfois avec certaines féministes lesbiennes militantes, pour qui l'homosexualité est le moyen d'une émancipation politique."

 

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