Non à l’indépendance des magistrats !

Bruno Bertez
Bruno Bertez
Analyste financier anc. propriétaire Agefi France

 

La France est à nouveau prise dans une tourmente judiciaire. Des juges ont, au mépris de toutes les règles écouté pendant de longs mois, les conversations de Sarkoyz et aussi celles de son avocat. Bien entendu, au passage, ils ont écouté des tiers. Ils invoquent,  leur propre jugement, ils veulent écouter et être indiscrets à discrétion. Ils ont jugé qu'ils pouvaient s'autoriser à le faire. Face au tollé que soulèvent leurs pratiques, ils dégagent en touche et réclament, une nième fois leur indépendance à l'égard du politique.

Réfléchissez, voulez-vous vraiment donner les pleins pouvoirs aux juges ayatollahs ? Réfléchissez-y  à deux fois. Faut-il laisser les illuminés qui ont fait la preuve de leur partialité, qui ont fait la preuve de leur mépris pour le public, faut-il les laisser faire absolument ce qu’ils veulent ? La question s’est posée, il y a quelques mois, à propos du scandaleux « mur des cons » révélé par la presse. Un mur ignoble de haine dégoulinante.

Vous vous souvenez de cette affaire. Les juges  du Syndicat de la Magistrature se défoulaient dans leur local syndical en insultant les justiciables précisément et le public plus largement. Le pire est que,  dans cette affaire, ils n’ont même pas eu honte. Tout ce qu’ils ont trouvé à dire, c’est : « il faut redire que le local syndical est assimilé à un domicile inviolable où chacun, comme à son domicile,  peut s’y exprimer en totale liberté et y accueillir en confiance ses invités ».

Ainsi donc, voilà nos ayatollahs qui considèrent que leur local syndical est inviolable mais qui, en même temps, défendent l’idée que les conversations entre un justiciable et son avocat peuvent être écoutées à leur seule appréciation.  Et même toutes les autres conversations de cet avocat ! Car voilà ce qu’ils demandent, ils demandent à n’être tenus par aucune règle, ils demandent la liberté de juger par eux-mêmes, et nous aurions envie d’ajouter en leur âme et conscience, si le « mur des cons » ne nous faisait douter qu’ils en aient une.

Nous n’avons jamais pensé que la Justice avait grand-chose à voir avec la morale ou avec l’équité. Les juges forment une classe sociale comme une autre. Ils exercent un métier pour gagner de l’argent et,  évidemment, pour faire carrière. Il n'y a pas de juge « pur esprit », sans passion, pas plus qu'il n'y a de journaliste parfait, désintéressé et objectif. Et ceux qui ne font pas carrière exigent d’avoir le droit d’être amers et aigris et, ainsi, de pouvoir se venger du monde entier. Les juges, en France, n'aiment pas l'ordre social français, voilà ce que l'on cache. Ils n'aiment ni l'économie, ni la production de richesse.

A choisir entre l’arbitraire haineux du petit magistrat gauchiste qui sort de l’Ecole de Bordeaux et la dépendance à l’égard du politique, c’est-à-dire la dépendance à l’égard du souverain, pour peu que la démocratie existe encore, nous préférons la dépendance à l’égard du politique. Tout plutôt que « l'appréciation personnelle » de ces ayatollahs. Tout plutôt que les influences souterraines des sociétés de pensée -suivez mon regard- qui sont là sur un terrain privilégié pour exercer leurs influences. Plutôt que de dépendre du pouvoir politique, ils préfèrent dépendre des pouvoirs occultes. Chacun a sa volonté de puissance et veut son fief à lui tout seul, n'est-ce pas ?

Car l'indépendance des juges n'est, ni le problème, ni la solution, le problème, c'est l'arbitraire généralisé dans l'interprétation et l'application des lois, le deux poids, deux mesures, la subjectivité débridée, etc. Le problème, c'est l'insuffisante sanction des classes dominantes en général, insuffisance qui permet leur  perpétuation et leur reproduction.

Les magistrats n’ont de cesse d’utiliser tout prétexte pour vouloir être indépendants. Toute personne qui les connaît sait que, précisément, s’il y a bien une chose à ne pas leur donner, c’est bien leur indépendance. Les magistrats sont des hommes, des femmes, tout prouve qu’ils ont des biais considérables, qu’ils ont des insuffisances et que, dans beaucoup de domaines, ils sont incompétents. En particulier en matière financière. La connaissance du droit et de la procédure ne remplace pas la compréhension de la chose financière. Le mythe de l'objectivité et de la détention de la vérité est un masque, une hypocrisie, qui permet à certaines classes sociales de ne pas rendre compte. Nous préférons l'aveu de la relativité tel qu'il se manifeste dans le système dit « des dépouilles » à l’attrape-nigaud de l'indépendance des magistrats.

La réalité est que la Justice, comme tout le reste en France, est biaisée, faussée, qu’elle est partiale, non pas d'une partialité consciente, voulue, mais d'une partialité enracinée dans une culture  que les juges, moins que tout autre, sont capables de remettre en question.

Ce n’est pas en donnant leur indépendance aux magistrats que l’on résoudra les problèmes d'une justice qui dysfonctionne, car on remplacera l’arbitraire de la droite ou de la gauche par celui du milieu et celui-là ne vaut pas forcément beaucoup plus que le Milieu auquel la Justice a généralement affaire.

Non, la priorité est de revaloriser la profession, lui redonner dignité, faire en  sorte qu'elle puisse accomplir sa mission, avec des moyens adaptés, des compétences, des formations, des rémunérations, conformes à ses responsabilités.

Bruno Bertez, 14 mars 2014

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