A propos du racisme…

Bruno Bertez
Bruno Bertez
Analyste financier anc. propriétaire Agefi France

En bref, pour revenir à l’actualité du racisme, nous disons que ce sont ceux qui produisent le mal qui se permettent de le dénoncer.

 

Les logiques qui gouvernent le comportement, le fonctionnement et l'évolution des sociétés, doivent rester cachées. Quand elles sont mises au grand jour, elles cessent d'être efficaces. Et il en va ainsi de tout système complexe, en particulier,  le vôtre. Celui de votre psyché. Un système ne survit que de l'ignorance de ses lois. Vous êtes soumis à la tyrannie de votre inconscient, mais dès que vous avez conscience de ce qui vous meut, vous pouvez agir dessus, vous récupérez une possibilité de choix. Vous avez beaucoup plus de chance d'agir sur ce que vous connaissez que sur ce dont vous ignorez l'existence même. Vous n'êtes plus agi, par l'autre qui est en vous. Retenez bien cette image de « l'autre qui est en vous ».  Sitôt que ce qui était enfoui réapparait à votre conscience, vous avez prise dessus.

 

Puisque le thème du racisme redevient à la mode, disons que si vous preniez conscience du fait que la rage que vous avez au ventre, que les sentiments noirs que vous nourrissez ont pour origine quelque chose de caché, alors vous seriez moins enclins à rechercher un bouc émissaire. Regardez l'automobiliste qui est gêné par un autre automobiliste qui lui grille la priorité, il s'exclame. Encore une femme! Pourquoi? Parce qu'il faut que quelque chose se décharge, trouve à sortir, et ce quelque chose emprunte la voie la plus primaire, celle de la décharge et du soulagement maximum pour l'effort minimum. Nous avons pris l'exemple de la femme comme victime, mais bien sûr,  vous avez transposé vous-même au racisme ou à une autre catégorie à la mode en ce moment et apte à jouer ce rôle de réceptacle de décharge... Ce que nous voulons souligner, c'est que nous sommes des humains, imparfaits, nous ne sommes pas de bois et, quand nous souffrons, quand nous sommes gênés, il faut que cela sorte. Par le chemin le plus court. La foule, c'est encore pire et plus que l'individu sous cet aspect.

 

Le bouc émissaire est un tenant lieu, une forme vide, dont la fonction est de jouer le rôle de substitut. Ce n'est pas un hasard si les difficultés des années 20 et la crise des années 30 ont produit une montée considérable des rejets racistes, xénophobes, exprimées sous couvert de doctrines politiques d'extrême droite. Les gens souffraient, ils avaient conscience que cela n'allait pas. Les causes n'étaient pas claires et surtout elles étaient cachées, comme maintenant: causes financières, bancaires, monétaires.

 

Les politiques et les élites n'ont pas fait leur travail d’analyse, de recherche puis d'explication de ce qui se passait. Comme maintenant, ils ont menti, croyant préserver, croyant bien faire. Ce qui était caché, la réalité de la crise financière, la responsabilité de la finance, de la globalisation financière,  est revenu, déplacé, perverti sous forme de haine sur la cible la plus facile et la plus primaire, à savoir le financier et son incarnation dans l'inconscient collectif. Ce qui était en  cause, c'est la logique cachée de la finance, sa loi d'airain qui impose aux capitaux la concurrence pour le profit.   C'est la suraccumulation de capitaux spéculatifs et ce qui apparaissait aux gens, ce sont les personnes. Les personnes sont visibles, l'Autre  qui habite ce système -celui que nous avons souligné ci-dessus– ne l'est pas. Le responsable, c'était la logique non connue, enfouie du système, et le peuple, lui, ne voyait que les symboles qui manifestaient cette logique, symboles anciens, tellement anciens qu'ils étaient devenus des réceptacles de projections primaires sur lesquelles l'intelligence et la raison n'avaient aucune prise.

 

La haine du  bouc émissaire est l'extériorisation de ce qui est caché et qui fait mal. Il faut un responsable et on trouve. On trouve toujours. Nous maintenons que toutes  ces choses négatives sont :

–                    le fruit de l'ignorance de ce qui se trame et se passe dans les profondeurs du système

–                    le raccourci primaire qui permet la décharge du négatif qui est en nous

–                    le produit des mensonges et des manipulations des tenants du Pouvoir.

 

Ces gens sont en triple  faute, d’abord parce que ce sont des incapables, ils gèrent mal, ensuite, parce qu'ils négligent de faire prendre conscience de ce qui est véritablement en cause, pourquoi cela fait mal, par quels mécanismes et enfin,  parce qu'ils évitent d'expliquer le sens de leurs pseudo-remèdes.

 

Ce qui agit, répétons-le, c'est ce qui est caché. Refoulé. Et Dieu sait si tout ce qui touche aux mystères de l’argent, de la banque et de la finance, est soigneusement mis hors de portée de la compréhension des citoyens.

 

Nous avons pris comme exemple, facile si l'on peut dire, les mystères de l'argent. C'est l'un des plus agissants en ces temps de crise. Mais  il y en a d'autres  qui produisent des rejets, de l'intolérance, de la xénophobie, citons les mystères de la concurrence, de la valeur des choses, de la formation du profit...

 

En bref, pour revenir à l'actualité du racisme, nous disons que ce sont ceux qui produisent le mal qui se permettent de le dénoncer.

Bruno Bertez, 14 novembre 2013

 

 

3 commentaires

  1. Posté par Bruno Bertez le

    Je vous remercie de votre intérêt.
    Mais non je ne parle pas de la finance dont Hollande ou Montebourg se veulen les ennemis. Eux n’ont pas compris que la finance normale était comme vous le dites, inséparable , catégorie de l’économie. Et les progrès en matière de monnaie et de finance ont été très bénéfiques pour les économies réelles , je ne cesse de le souligner. De même je ne stigmatise pas , loin de là, la finance dans sa fonction d’investissement et d’allocation des ressources. En revanche je décris généralement assez clairement la dérive de la finance intervenue depuis la déréglementaion du
    début des années 80 , sa mutation, ses excès. Je démontre assez facilement -et je ne suis pas le seul- la financiarisation des économies, la rupture du lien entre la Sphère réelle et la Sphère financière et j’en tire des conclusions négatives. Permettez moi une comparaison vulgaire , il ne faut confondre l’amour et la pornographie. La finance normale étant bien entendu l’amour et la financiarisation actuelle étant la pornographie.
    Sur le second point . Non , mon intérêt pour le thème du racisme n’a rien à voir avec le « une » de Minute.Pas plus que je ne suis intéressé par les « unes » de son symétrique d’extrême gauche, Charlie Hebdo, pourtant plus violentes et choquantes. Mon intérêt pour le racisme date de l’affaire des Roms. Mon apport, si il y en a un, en cette matière, consiste à attirer l’attention sur le fait que le système du bouc émissaire a à voir avec le non-dit, le refoulé. Et j’indique comme une piste à explorer la verbalisation , la clarification , la prise de conscience de ce qui est actuellement à l’oeuvre dans nos sociétés. La vérité est un antidote anti-raciste, anti-fasciste.

  2. Posté par Géo le

    Vous parlez de finance, celle dont Hollande se veut l’ennemi. Comme si on pouvait séparer l’économie de la finance. Un des facteurs premiers du sous-développement de l’Afrique, c’est l’impossibilité quasi totale d’obtenir du crédit…
    La crise européenne est surtout le fait de la délocalisation de sa production de biens, toujours plus sophistiqués. D’abord le textile, puis les montres, l’électronique et bientôt EADS partira pour Hong Kong sans que les dirigeants européens y voient quelque chose à redire. Au contraire, ils s’acharneront contre l’Allemagne parce qu’elle produit trop et trop bien. Le bon élève, pour les Européens, c’est la France. Là au moins, l’économie et la finance n’ont aucune chance de survie…
    Si vous abordez le racisme, c’est probablement à cause de l’affaire de la couverture de Minute sur Taubira. Et ce qu’il y a d’incroyable, c’est que personne ne relève que ce qui est grave, c’est que l’on rentre dans les schémas des années trente. C’est-à-dire qu’on s’appuie sur quelques personnes pour faire croire que le racisme des années trente est encore un problème, et que ce faisant, on est dans le racisme. La couverture de Minute, je la lis au second degré. »Maligne comme un singe, Taubira a la banane » joue sur le racisme, mais n’est pas du racisme. Toutes les couvertures de Charlie Hebdo, sans exception, jouent sur ce principe. On veut pouvoir rire de tout sur tout et avec n’importe qui en France, quand on est de l’ultragauche. Voir l’affaire des caricatures de Mahomet et l’attitude de précisèment Charlie Hebdo. Avec le soutien de Sarkozy…
    Et on inverse le paradigme quand il s’agit de l’ultra-droite. Alors la question se pose une fois de plus : y a t-il de bons et de mauvais racismes ? Prétendre que le racisme anti-noir ou des gags à ce sujet doivent être évités est particulièrement dangereux : cela revient à prétendre que les Noirs ne sont pas assez intelligents pour se défendre eux-mêmes

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