Peter Brabeck: salle comble à la Foire du Valais.

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Le prestige de l'invité a facilement empli la salle Bonne-de-Bourbon à l'occasion de la traditionnelle journée de l'économie de la Foire du Valais. Et les nombreux invités, ténors de l'économie et de la politique pour la plupart, n'ont pas regretté le déplacement. L'orateur et débatteur Brabeck a montré le même talent que le patron de Nestlé. Ses arguments clairs et bien étayés, parfois teintés d'humour, ont su passionner l'assistance où l'on ne notait cependant que peu de représentants du monde ouvrier. Et, ils n'ont pas pris la parole à l'heure des questions.

L'échec comme valeur de vie

Peter Brabeck a articulé sa présentation sur trois axes distincts de premier abord mais dont il a évoqué les interactions les explicitant par des exemples concrets et des expériences personnelles. Il a relevé l'importance du succès dans notre société, encore amplifiée quotidiennement par les médias. Il en a aussi souligné la fragilité:
"Les médias vous célèbrent à l'excès un jour et vous traînent dans la boue les dix suivants à la moindre peccadille." "Rien n'est plus ancien que la réussite d'hier"
, ajoute-t-il pour bien faire comprendre qu'il faut savoir chaque jour remettre l'ouvrage sur le métier pour continuer à exister.
"L'autosatisfaction conduit dans le mur. Et, le succès est dangereux, il ne nous apprend rien alors que les échecs nous grandissent, prouvent que nous avons osé prendre des risques. Pers
onne ne monte dans la hiérarchie chez nous qui n'a pas son lot d'échecs à faire valoir lors de l'entretien de promotion"
, explique-t-il.

Le danger Minder

Le patron de Nestlé regrette cet esprit bien suisse qui n'aime pas les têtes qui dépassent et qui se méfie de la réussite. Une tendance confirmée par l'acceptation de l'initiative Minder dont il rappelle certains dangers peu ou pas évoqués durant la campagne:
"Tout à l'émotion suscitée par des salaires qu'il juge inacceptables, mais aussi par les déclarations arrogantes d'un grand patron suisse, les citoyens ont accepté un texte dangereux pour la prospérité du pays."
Et d'évoquer le problème d'un conseil d'administration à réélire chaque année, constamment en campagne et axé sur le court terme pour ne pas manquer sa nomination. Mais aussi le nouveau pouvoir des actionnaires qui va bouter les forces de décision hors de Suisse puisque les grandes sociétés helvétiques appartiennent pour deux tiers au moins aux étrangers qui désormais trancheront.
"Croyez-vous que, ces dix dernières années, Nestlé aurait investi en Suisse plus de trois milliards de francs avec 3400 postes de travail à la clef si des actionnaires étrangers avaient décidé au lieu d'un conseil d'administration à majorité helvétique?"
, illustre-t-il.

Le pouvoir, un outil

"On entend: le pouvoir est mauvais"
, cite le président de Nestlé.
"Or, le pouvoir n'est ni bon ni mau
vais. Sans lui, pas moyen d'imposer
des idées, même bonnes, pas moyen de diriger une entreprise, grande ou petite. En Suisse, le peuple donne le pouvoir, grâce à la démocratie. La sagesse populaire peut s'exprimer contrairement aux dictatures dont nous haïssons le pouvoir",
compare-t-il.
"Nestlé ne décide pas. Les chefs d'Etat lui permettent ou non de travailler dans leurs pays. De la même manière, le peuple suisse choisira bientôt lors de votations s'il veut continuer de mettre à disposition de l'économie nationale les conditions-cadres, la souplesse de droit qui ont fait sa prospérité et qui distinguent la Suisse de ses voisins."
Un conseil clair même si, bien entendu, le patron de Nestlé ne fait pas de politique.

Du pouvoir à la responsabilité

"La réussite d'une entreprise dépend de son conseil d'administration. Or, aujourd'hui, on veut l'affaiblir alors qu'il faudrait le ren
forcer"
, plaide Peter Brabeck qui fustige ces actionnaires d'un jour, ces hedge funds qui enflamment la bourse pour du profit immédiat au détriment de la santé des entreprises qui ont besoin de recul pour prospérer. Il s'élève aussi contre les milliers de règles nouvelles qui viennent plomber la gouvernance des sociétés.
"Sans espace de liberté, sans confiance, le conseil d'administration ne peut plus faire son travail, ne peut, en fait, plus prendre les responsabilités que donne le pouvoir puisqu'on le lui rabote chaque jour"
, déplore-t-il.

Après la présentation de Peter Brabeck, la salle a assisté à un débat qui a vu Christophe Passer, rédacteur en chef adjoint de "L'Hebdo", et Jean-Yves Gabbud, rédacteur en chef adjoint du "Nouvelliste", lui demander de préciser ses prises de position parfois sévères sur la politique suisse en matière d'économie.

Déçu par Minder, le président de Nestlé a réitéré ses mises en garde au peuple suisse quant à l'initiative 1 :12. Selon lui, son acceptation mettrait en danger la prospérité du pays. Les Suisses doivent savoir quelle société ils veulent. Celle qu'ils connaissent actuellement ou celle qui règne en France ou en Espagne.
"Le choix se trouve dans les urnes"
, martèle-t-il, applaudi par une assistance quasi totalement acquise à ses idées. "
Même dans les dictatures, l'Etat ne fixe pas la quotité des salaires"
, poursuit-il.

Titillé sur la question des salaires, disons confortables, de certains dirigeants du Credit Suisse ou de Nestlé, il a expliqué sa vision des choses:
"En dix ans, le management de Nestlé a dégagé 100 milliards de francs de valeur ajoutée. Il faut analyser les 50 millions annuels de la direction à cette aune-là."
Nouveaux applaudissements de la salle.

Quant à la crise financière, le patron de Nestlé la distingue de l'économie réelle et explique son effet négatif sur celle-ci. Il se dit favorable à des règles sévères et impératives dans le secteur de la finance et met en garde contre des politiques irréalistes comme celle de Bill Clinton qui, en promettant une maison à chacun quel que soit son revenu, a induit la crise des subprime et ses suites catastrophiques. Pour terminer, Peter Brabeck a dit sa confiance en la Suisse qui a su accueillir l'étranger qu'il est et qui possède un fort potentiel grâce au goût pour le travail de sa population.
PM

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