L’initiative du GSsA ne menace pas que la sécurité de la Suisse…

Dominique Baettig
Dominique Baettig
Médecin, Ancien Conseiller national
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Les Verts, le Parti socialiste, mais aussi certains libéraux et autres modernistes « hors sol » pensent que l’armée de milice, comme la Nation, le mariage, la reconnaissance de la différence des sexes, la démocratie directe sont des valeurs de « grand-papa » qui n’ont plus leur place dans une société d’individualisme, de consommation de droits et de marchandises. Ils ont tort.

L’initiative du GSsA ne menace pas que la sécurité de la Suisse, mais aussi la démocratie, la souveraineté, les valeurs citoyennes fondatrices de la Confédération.

Les Verts, le Parti socialiste, mais aussi certains libéraux et autres modernistes « hors sol » pensent que l’armée de milice, comme la Nation, le mariage, la reconnaissance de la différence des  sexes, la démocratie directe sont des valeurs de « grand-papa » qui n’ont plus leur place dans une société d’individualisme, de consommation de droits et de marchandises. Ils ont tort. La défense nationale est une valeur citoyenne beaucoup trop importante pour être laissée exclusivement à l’Etat, à des volontaires aux motivations disparates, à des professionnels recrutés chez les migrants ou les marginaux ou simplement payés par des compagnies privées et supranationales (Blackwater, achetée récemment par Monsanto !). On trouve certes beaucoup de naïveté et de politiquement correct dans la nébuleuse des initiants (féministes, pacifistes, partisans de la délégation des tâches de défense à l’Europe et à l’OTAN, Jivaros libéraux qui veulent réduire les effectifs de l’armée en raison de son coût ou de son poids pour l’économie). Mais ne nous y trompons pas, il s’agit bien ici de tenter une nouvelle fois de supprimer l’armée de milice qui est un (si ce n’est le...) fondement de la démocratie directe de proximité. L’engagement citoyen reste vraisemblablement le seul rempart contre les dérives centralisatrices de l’économie globalisée, l’oligarchie financière et économique, l’Empire du « Bien » qui mène partout dans le monde des guerres « humanitaires », soi-disant protectrices, mais en fait d’hégémonie et d’arrogance politique dominatrice. On essaie aussi de faire croire que la paix progresse dans le monde, alors que les guerres s’y poursuivent, certes sous une forme nouvelle : contre le « terrorisme », guerres asymétriques, insurrections armées et de subversion contre les Etats nations souverains (en Syrie après l’Irak), djihadistes mobiles mais aux motivations douteuses. Organisation généralisée de chaos, construction d’Etats faillis et vulnérables (Libye, Sud Soudan). Sans oublier les « sanctions » économiques imposées aux Etats résistants, les pressions migratoires organisées et ponctionnées financièrement par les mafias et autres filières du crime organisé. La guerre prend certes de nouvelles formes et il est important, en effet, de compléter (et non pas d’abandonner…) le modèle de « grand-papa ». Un petit pays souverain et démocratique comme la Suisse  a besoin d’une armée défensive, capable d’empêcher l’occupation du territoire par une armée ennemie conventionnelle ou des groupes armés subversifs, criminels qui ont proliféré dans des zones de non-droit .Mais la guerre ne se limite pas à la seule dimension de l’usage des armes. Il existe aussi des actions de guerre économique et l’indépendance, l’autonomie, dans cette ère de mondialisation, est une dimension fragilisée .Il y aurait des biens de subsistance stockés seulement pour près de trois jours dans les magasins. L’approvisionnement énergétique, électrique est très fragile, peut être perturbé facilement (cyberguerre) et créerait un chaos rapide. Il faut penser à des solutions alternatives. C’est pourquoi l’armée d’un petit Etat souverain doit s’appuyer sur des moyens dissuasifs modernes mais aussi se préparer à des techniques de combat et de résistance asymétriques ( David contre Goliath), disposer de relais et de racines dans la population. Comme le disait Mao Zedong, pour vaincre, une guérilla doit pouvoir évoluer «  dans la population comme un poisson dans l’eau ». Jamais une armée de volontaires ou professionnelle ne pourrait offrir cette fonction complémentaire et indispensable. Sans oublier que l’économie doit aussi être prête à assurer l’indépendance et la survie. L’exemple du fameux plan « Wahlen » reste riche d’enseignements et d’expériences utilisables. L’armée de milice, l’obligation de servir sont des garanties fondamentales de résistance contre l’occupation étrangère, la dictature de groupes armés et de l’économie globalisée contrôlée par une oligarchie. Le soldat (et la soldate de milice) connaissent les recoins de leur territoire et de leur terrain, garantissent une solidarité économique et technique irremplaçables. L’armée de milice est un creuset civique majeur, met en contact des gens qui jamais ne se rencontreraient ailleurs, crée une identité enracinée et culturelle forgée dans l’effort, le don de soi, la gratuité du « temps perdu » consacré à cette activité économiquement moins rentable. L’armée doit aussi préparer les citoyennes et citoyens à des techniques de survie, d’organisation et de réactivation d’économies indépendantes, de préparation au retour à l’usage de techniques de communication simples, d’usage des armes et de techniques de guérilla asymétriques. Non seulement l’obligation de servir doit être maintenue (peut-être même plus étendue aux femmes, aux migrants en cours de naturalisation) mais la formation militaire aux techniques de survie et d’organisation de la souveraineté devrait être largement redéfinie. La sécurité des ambassades, l’aide au maintien de la sécurité en Europe ou ailleurs dans le Monde ne sont pas fondamentales. La guerre qui s’éternise en Syrie est un modèle d’enseignements. L’armée syrienne était une armée classique de conscription, préparée à la guerre classique contre des nations voisines belliqueuses. Cette armée a été divisée par des forces de rébellion soutenues par des nations voisines et lointaines (Turquie, Qatar, Libye) qui ont facilité l’arrivées de « contras » djihadistes armés pour occuper des zones, nettoyer des quartiers, gommer l’autorité de l’Etat national laïc. L’armée syrienne a dû s’adapter en complétant ses moyens classiques ( chars, aviation, hélicoptères de combat) par le recours à une « armée de défense nationale » issue de Comités de défense populaire de quartiers. Parmi les autres exemples dignes d’être étudiés, n’oublions pas l’armée iranienne qui a dû mobiliser sa population lors de la guerre déclenchée par l’Irak pour le compte de puissances impérialistes et  le Hezbollah libanais, expert en techniques de guerre asymétrique de résistance populaire. Le modèle suisse est excellent, démocratique, solidaire, civique, populaire. Ne le gaspillons pas. Au contraire approfondissons-le…

Dominique Baettig

7 commentaires

  1. Posté par Helvète le

    Sous couvert de cette initiative, c’est bien la défense de la Suisse que l’on veut annihiler. Une conscription volontaire est utopique, une armée professionnelle trop coûteuse (30’000 hommes ayant un revenu moyen de 100’00 francs/an coûteraient 3 milliards par année et en cas de conflit on ne pourrait assurer de relève). La PCi disparaîtrait, ainsi qu’un grand nombre de structures. En cas de troubles intérieurs ou extérieurs, il faudrait 4 à 5 ans pour reformer une armée cohérente. En 1935, les Socialistes nous chantaient déjà cette berceuse rassurante. Quatre ans plus tard, Hitler attaquait la Pologne, avec l’aide de l’Union der Républiques Soviétiques Socialistes. Le GSsA, un fossile de la désinformation mise sur pied lors de la guerre froide ou une « 5ème colonne » remise au goût du jour ?

  2. Posté par Helvète le

    Les partis de gauche sont solidaires avec les requérants d’asile, bons ou mauvais, les mendiants, mafieux ou non, les sans-papiers à qui ils offrent illégalement du travail, mais lorsqu’il s’agit de se préparer à défendre notre pays, notre démocratie ou ses acquis et de risquer de devoir se battre, ils ne sont plus d’accord. Bien peu logique. Qui a dit suspect ?

  3. Posté par Antonio Giovanni le

    « Les Verts, le Parti socialiste, mais aussi certains libéraux et autres modernistes «hors sol» .. » sont tombés dans le gouffre du conformisme des années 60, quand l’URSS dirigeait ses groupes d’agitprop à seule fin de démoraliser l’ennemi occidental, tandis qu’elle renforçait démesurément ses moyens militaires et alors, pour paraphraser, « les militaires et leurs chars étaient à l’Est et antimilitaristes et leurs objecteurs à l’Ouest »; le conformisme est le rocher auquel sont collés comme des moules les Verts, le Parti socialiste, mais aussi certains libéraux et autres modernistes «hors sol»; toutes leurs actions ne sont dictées que par des idées qu’ils ressassent depuis des décennies déjà faute d’anticiper; les Verts, le Parti socialiste, mais aussi certains libéraux et autres modernistes «hors sol» veulent démanteler encore et toujours ce qu’ils ont trouvé en naissant, mais sont incapables de proposer le renouveau dont le pays aura besoin dans quarante ans, par exemple: ces Verts, ce Parti socialiste, mais aussi ces libéraux et autres modernistes «hors sol» ne voient que par le petit bout de la lorgnette…

  4. Posté par Eddie Mabillard le

    Blackwater, achetée récemment par Monsanto !
    Cette phrase dans votre texte me fait froid dans le dos. Imaginez-vous que si vous plantez une semence qui n’est pas dans le catalogue ou que Monsanto n’est pas d’accord il envoie ses soldats pour vous arrêter et peut-être même vous lapidez pour avoir osé passé outre au dieu le père de la planète. Ou si des voisins qui ont subi la coercition de ce dieu pour planter ses semences et que les pollens se croisent avec les vôtres vous serez trainé en justice pour vol, recel, usurpation de brevet ou je ne sais quoi, cela s’est déjà passé au Canada.
    Et pendant ce temps, nos politiciens sortent la vaseline devant ces truands. Eh bien! le futur pour le citoyen lambda est bien sombre!
    Il faut voter NON à l’initiative du Gssa en septembre si l’on veut encore avoir une parcelle de liberté.

  5. Posté par Zeller Philippe le

    Et dire qu’on ne s’aperçoit pas qu’il existe en Suisse un service militaire volontaire pour… les femmes. C’est un succès qualitatif , mais un « énaurme » échec quantitatif: quelque deux mille suissesses seulement sont volontairement incorporées à notre armée.

  6. Posté par Noël Cramer le

    Vous avez effectivement tout dit en défense d’une armée de milice. Le monde est devenu un endroit plus dangereux. La nature des menaces potentielles qui concernent notre société a changé de visage – est devenue plus complexe et moins prévisible. Et, en fin de compte, il restera toujours nécessaire d’avoir la capacité de réagir par la force. D’une manière motivée chez chacun par le sentiment d’être directement concerné par le danger: en d’autres termes par une milice populaire…
    Comme vous le dites aussi, l’obligation de servir regroupe des jeunes de tous les milieux sociaux et, généralement, réduit les barrières sociales en réveillant du respect mutuel entre les « classes » ainsi qu’une conscience de solidarité. À un âge où on construit encore sa personnalité. Ce fut ma grande « découverte » formatrice lors de mon école de recrues. En dépit – il faut l’avouer – du constat que la hiérarchie militaire permettait aussi à une petite minorité de personnes médiocres d’accéder à un pouvoir démesuré… Mais c’était en 1961, et je pense que la situation a changé depuis.

  7. Posté par Le pragmatique le

    Citadin de souche oû donc aurais-je connu des agriculteurs, des manuels, des alémaniques et partagé avec eux des moments d’amitié dans des contextes difficiles et parfois joyeux.

    Ça m’a permis aussi d’apprendre à vivre sans confort et dans une certaine humilité.
    Je reste persuadé, avec du recul que cette expérience enrichit la cohésion nationale et fait tomber beaucoup de différences.

    Ça c’est de la multiculturalité.

    Après la veste socialo sur le durcissement du droit d’asile, ils redemandent une nouvelle douche. Décidement, cette bien-pensance nécessite un grand nettoyage.

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