« Pourquoi j’ai adhéré à Versus13 »

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Interview exclusive de l’éditeur Slobodan Despot.

Slobodan Despot, on vous a entendu dire jeudi soir 25 avril aux nouvelles de la RSR que vous aviez signé la charte "Versus 13". De la part d'un proche d'Oskar Freysinger, c'est assez surprenant. D'aucuns ont même cru à une erreur.

SD: Au moment de cet entretien, je l'avais seulement approuvée sur Facebook. C'est désormais également chose faite via la liste officielle (vs13.ch). Cette charte prône l'ouverture à autrui via une "curiosité respectueuse", rappelle les bienfaits de la culture et le rôle de contre-pouvoir qui devrait être celui de la presse… Rien que des valeurs effectivement menacées, que je prise personnellement et que j'essaie d'incarner par mon travail d'éditeur et de passeur d'idées. Rejeter une déclaration aussi généreuse et générale, cela équivaudrait à déclarer qu'on n'aime pas les enfants, le rire ou la musique.

Elle souligne en même temps que "l’inflation d’actes et de discours agressivement identitaires, xénophobes et racistes" est alarmante. La visée politique n'échappe à personne.

SD : Oui, mais c'est là encore une vérité. La Culture est une et englobante. Les cultures sont plurielles et se construisent souvent par exclusion des autres. Reste à savoir qui exclut autrui, concrètement, et pour quelle raison.

Etant immigré moi-même, partagé entre trois patries, écrivant et publiant dans trois langues et traduisant de six, il va de soi que je ne me sens pas trop concerné par cette problématique-là, sinon, étant toujours un peu décalé, en tant qu'observateur.

Par exemple, quand vous lisez "repli identitaire", vous songez par réflexe à une identité nationale ou religieuse, mais le repli de classe ou de caste peut être tout aussi flagrant. Par exemple, le repli de la classe intellectuelle "éclairée" et "de gauche" sur des valeurs qui lui sont propres et où l'immense majorité de la population ne se reconnaît pas.

En l'occurrence, je me suis étonné qu'un mouvement positif, se déclarant pour un Valais ouvert "où l'identité ne se construit pas contre l'autre", se soit donné pour nom "Contre 13" ("versus" signifiant en latin "par opposition à"). Pourquoi se définir d'emblée par une négation? Ce lapsus sémantique a sans doute échappé aux initiants, signe peut-être de la spontanéité de leur démarche.

Ne jouons pas à cache-cache: il s'agit d'une allusion à peine voilée à l'élection d'Oskar Freysinger. Comme vous l'avez dit vous-même, n'est-ce pas en premier lieu une pression sur le conseil d'Etat valaisan à la veille de l'attribution des dicastères, dont celui de l'éducation et de la culture?

Peut-être, à l'origine, dans l'esprit de certains initiants. Mais, par exemple, l'actuel responsable de la culture en Valais, M. Cordonier, a pris la peine, suite à mon intervention radio, de m'écrire pour m'exposer les raisons de son adhésion, signe que certains sous-entendus de cette démarche suscitent le malaise. Mais je vois qu'aujourd'hui ils publient une mise au point: "Notre Charte s'adresse à la société valaisanne. Elle ne désigne pas un politique particulier. Elle entend pousser à la réflexion sur notre canton et son devenir." Avec cet amendement, Oskar Freysinger pourrait signer la charte les yeux fermés.

Vous plaisantez, là?

Pas du tout. Je pense que le Valais a réellement besoin d'ouverture culturelle. Certains croient apercevoir un risque d'enfermement en aval des dernières élections au Conseil d'Etat, d'autres l'ont éprouvé en amont. Or le passé est le passé, nous n'y changerons rien; mais le futur de notre communauté, nous le construisons par tous nos actes, et nous le construisons tous. Mieux vaut le faire sur le mode de l'entente que sur celui du conflit. Ou du moins en connaissant la valeur et les intentions des autres parties.

Oskar Freysinger a bien réagi en proposant immédiatement et publiquement une rencontre informelle avec les protagonistes préoccupés du monde culturel. Ce samedi 27 avril à 10 heures, au "New Bisse" de Savièse, on verra clairement qui est soucieux de dialogue et qui n'avait que des arrière-pensées politiques.

Indépendamment de ces tensions, révélatrices des changements réels qui se préparent, la démarche VS13 a l'immense mérite de remettre la culture au centre du débat public et je ne peux que relayer l'invitation des auteurs de la Charte : "Nous invitons les Valaisans et toutes les personnes curieuses et ouvertes sur le monde à la signer."

PS. 27.04.2013 - Slobodan Despot était le seul signataire de la charte présent à la rencontre proposée par Oskar Freysinger.

 

Entendre encore

Interview RSR 25.04.13

 

Voir encore

Le blog de Slobodan Despot

Le site des éditions Xénia

Un commentaire

  1. Posté par M.T le

    100% politique ce truc.
    Il est possible et très difficile d’être ouvert et en même temps de vouloir conserver le plus possible.
    Cependant le changement n’est pas un choix, il est inévitable. Seule la direction du changement est en question.
    Nous savons déjà que la diversité culturelle et ethnique dans le monde est décroissante.
    Nous savons aussi que nous allons tous mourir, cela n’empêche pas le combat pour la vie.
    Qui est ouvert à quoi ?
    Les anglais ont « ouvert » la Chine, vous savez ? A la vente/ou l’achat de l’opium…
    Les promoteurs de ce genre d' »ouverture » sont généralement fermés à la diversité culturelle et ethnique en vue du fait que leur « ouverture » élimine bel et bien cette dernière…du moins dans sa direction, dans l’essentiel sur la longue durée.

Et vous, qu'en pensez vous ?

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